Parce que le réseau des GRETA existe grâce à ses équipes et ses stagiaires, nous avons choisi de mettre en lumière la formation Titre professionnel cuisinier proposée par le Greta Val d’Allier à Brassac-les-Mines entre octobre 2019 et juillet 2020.

Aurélie, Valentin, Gérald et Eric nous permettent de vous offrir leur regard sur une aventure partagée durant le confinement : un défi culinaire.

Au sein d’un groupe de 8 stagiaires, les 3 témoins encadrés par Eric leur formateur, propriétaire du restaurant l’Auberge du Drac à la Chapelle-sur-Usson jusqu’en 2018 spécialiste de la cuisine aux huiles essentielles, ont accepté de nous exposer la manière dont ils ont vécu leurs semaines de confinement.

Face à la crise sanitaire, c’est au pied levé que, celui qui venait aussi d’être élu maire de son village en mars dernier, avait proposé de remplacer les travaux pratiques de cuisine qu’il assurait dans les cuisines du GRETA de Brassac par un apprentissage à distance et la réalisation de productions culinaires depuis leur domicile par les stagiaires.

Ce défi intitulé « Cuisinons à la maison », consistait à cuisiner pour sa famille sans acheter d’ingrédients spécifiques en découvrant chaque semaine une technique de cuisson. Plus de secrets donc pour ce groupe de futurs professionnels qui savait désormais pocher à chaud ou à froid, braiser ou procéder à la cuisson d’un ragoût ou d’un sauté, bref la technique nécessaire pour réaliser dans les règles de l’art l’entrée ou le plat imposés par le chef.

Un projet qui a nécessité de l’organisation pour connecter tout le monde sur la plateforme, et rendre accessibles de nombreuses ressources en ligne (web tv cuisine, livre numérique, chaîne Youtube).

Malgré les coups de mou, de véritables progrès ont été constatés, dextérité et envie de progresser ont été au rendez-vous grâce à la bienveillance et à l’implication de l’équipe pédagogique toujours très fortement mobilisée pour accompagner et soutenir les apprenants dans une situation de formation inédite.

« La cuisine confinée m’a permis de m’organiser comme dans un restaurant »
Après une 2ème année de Fac lettres modernes, Valentin VALERO a choisi de vivre sa passion de la cuisine, encouragé par ses proches. Comme ses 7 autres collègues, il a démarré sa formation en octobre et pu réaliser un premier stage dans un bistro puis un deuxième dans un restaurant étoilé qui a dû être interrompu. Confiné dans son appartement Valentin dresse un bilan positif de cette aventure : ancien stagiaire du CNED, le distanciel ne lui faisait pas peur. Le concours culinaire s’est révélé une excellente idée pour lui qui est un compétiteur dans l’âme : « j’ai appris beaucoup et paradoxalement la cuisine confinée m’a permis de m’organiser chez moi comme un vrai chef de restaurant ». Concédant qu’il est parfois compliqué de rester assidu à l’ordinateur et de garder un rythme pour rendre les travaux à temps notamment sur les matières plus générales, il pointe néanmoins le très bon suivi de l’équipe pédagogique via le drive et l’absence de routine.

« On rend des fiches techniques sur les recettes et notre organisation qui nous sont retournées annotées. Je vois que je peux gérer un menu, créer des plats et que j’arrive à me débrouiller seul, c’est une expérience « imposée » qui a du bon malgré mes réticences initiales sur cette pratique de la continuité pédagogique : une nouvelle façon pour apprendre la cuisine, peut-être à réfléchir ! », ajoute l’intéressé.

« Pendant le confinement je me suis senti en formation je me suis investi comme avant » conclut-il.

« Après 10 ans de boulots alimentaires, je voulais un métier qui me passionne et où je m’épanouisse » 
Pour Aurélie LALLOZ, l’objectif initial de la formation était d’approfondir les techniques de base et de décrocher une certification pour accéder plus facilement à un emploi.Passionnée de cuisine, son projet a mûri pendant la formation « Passeport pour l’emploi » qu’elle a réalisée au sein du Greta Val d’Allier. Confinée dans sa maison à la campagne à côté de Brioude avec ses 2 enfants de 9 ans et 10 ans, elle avoue que la maîtrise de l’outil informatique n’était pas son truc mais que grâce aux enfants l’application dédiée à la visio « Zoom » a pu être installée sur la tablette. Elle retiendra aussi que la réalisation des recettes à faire toute la semaine a nécessité de passer beaucoup de temps sur l’ordinateur pour rédiger des fiches techniques des entrées, plats et desserts ou de suivre les cours d’anglais en visio. Là aussi son mari a pu être mis à contribution sur la lecture du référentiel ! Aurélie ajoute aussi que la poursuite de la formation à distance a constitué un objectif en soi avec l’instauration d’un rythme de travail, d’horaires, de productions à rendre dans un temps donné. Même si elle regrette de n’avoir pu accomplir son deuxième stage pratique auprès d’un professionnel du secteur, elle est aussi consciente que l’expérience lui aura permis de se lancer dans la pâtisserie. « Moi qui suis d’abord cuisinière, j’ai appris à confectionner autre chose que des gâteaux au chocolat et aux pommes et les enfants ont été ravis, cela m’a amusé et m’a permis de sortir de ma zone de confort » souligne la jeune femme qui du coup a fait plaisir à toute sa famille !

 « Le projet traiteur toujours en tête »
Gérald SCHEPPERS, militaire de l’armée de terre en reconversion est le troisième de la bande. Débutant en cuisine, il a pour projet à long terme d’exercer l’activité de traiteur à domicile. Cette formation constituait donc pour lui une première étape pour apprendre et pratiquer les techniques culinaires de base. Le défi culinaire a nécessité une certaine adaptation pour ce dernier car au-delà de l’absence physique du formateur et de ses démonstrations pratiques en direct, il lui a fallu aussi apprendre à savoir jongler avec le quotidien familial et les devoirs des enfants. Un confinement qui génère encore des inquiétudes pour ce dernier qui concède que l’encadrement est « top » mais que les apprentissages en présence de l’enseignant lui manquent et que les manipulations des outils numériques restent encore compliquées.

 « Un confinement qui aura aussi modifié sa pratique professionnelle et généré un énorme travail de préparation notamment au démarrage pour faire adhérer les stagiaires au projet puis gérer la progression »
Eric TRILLEAUD, le formateur est conscient de la difficulté à assurer la continuité pédagogique des stagiaires avec ceux qui ont des enfants et doivent aussi gérer la vie familiale et la scolarité à distance de leur progéniture.
Ce défi culinaire, une semaine pour réaliser une recette entrée / plat avec rendu de photos, mais aussi fiches techniques et déroulé de l’organisation, il l’a imaginé, puis expérimenté auprès de ses élèves de lycée et porté auprès des 8 stagiaires de la formation continue. Celui qui enseigne également au lycée François Rabelais à Brassac les Mines apprécie le fait que l’expérience du défi culinaire ait encouragé la fibre littéraire et artistique de certains stagiaires, se félicitant ainsi d’avoir dans le groupe, des individualités qui, « ont la cuisine dans la peau et du potentiel ».

« La cuisine comporte une dimension littéraire dans tout ce que cela mobilise comme créativité et appel à l’imaginaire alors que la pâtisserie c’est plus de la rigueur et pour les mathématiciens » résume l’intéressé dans un sourire.

Un confinement qui aura aussi modifié sa pratique professionnelle et généré un énorme travail de préparation notamment au démarrage pour faire adhérer les stagiaires au projet puis en assurer le suivi. Un investissement d’autant plus important que sur la période de confinement il a également dispensé des modules supplémentaires sur les plats chauds et la culture professionnelle

« Même si la continuité pédagogique a parfois nécessité de remobiliser les troupes, le constat est positif » souligne le formateur qui rappelle que ses premiers cours à distance ont nécessité des journées de préparation qui s’étalaient de 8h à 22h et que ce boulot de dingue qui consistait « à lancer un cours, impulser un rythme de travail avec des exigences de rendus, à corriger, » aura eu le mérite de maintenir le lien avec tous les stagiaires. Ce constat est le même pour le lycée où la formule a également emporté l’adhésion.

La passion de son métier et l’envie de transmettre animent ce formateur qui vient de concevoir un cours sur l’histoire de la cuisine : « même si les techniques ont changé ; on n’a rien inventé

Lucide aussi, Eric a compris que la continuité dans la durée ne pouvait tenir qu’à condition de rendre ses stagiaires acteurs de la formation en les poussant à développer autonomie et force de proposition.


– Et leurs regards plus personnels sur cette période de confinement

Pour Valentin, le projet reste le même c’est celui d’ouvrir un restaurant. Ce qu’il attendait le plus à la sortie du confinement : faire du sport, marcher et bénéficier de plus de liberté. Pas d’inquiétude particulière sur la vie d’après « car on était tous dans le même bateau ! beaucoup de corps de métiers ont été en hibernation, on est tous au même niveau ».

Pour Gérald, le confinement lui aura fait redécouvrir le plaisir de jardiner ce qu’il n’avait pas fait depuis 20 ans. Il reste cependant inquiet par il ne se sent pas prêt pour l’examen en dépit d’une équipe top et d’un super cadre, « Le temps perdu ne pourra être rattrapé, le stage initialement prévu va aussi lui manquer.

Pour autant il conseille cette formation : « tous les cours sont bien, les formateurs vont bien, c’est une super formation. »

Pour Aurélie, la période de confinement n’aura pas révélé de passion nouvelle.  « Je suis très manuelle mais cette période « si particulière » ne m’a pas donné envie de me prêter à ces activités ». A la sortie du confinement une des premières choses qu’elle aura souhaité réaliser, c’est de voir du monde et notamment sa sœur et ses enfants qui avaient beaucoup manqué à toute la famille. Elle avoue également qu’elle qui n’aimait pas faire les courses, elle enviait presque son mari de les faire pour sortir un peu de chez elle !

Pour Eric, le confinement c’est aussi de beaux souvenirs… Participer chaque jeudi soir de la période de confinement à la préparation de repas distribués le lendemain par les bénévoles du secours populaire à Clermont-Ferrand. Cette opération de solidarité, à l’initiative de David ROBIN directeur des formations pour l’Institut des Métiers a été relayée par Christophe POTEVIN Directeur Délégué aux Formations Professionnels Techniques au Lycée François RABELAIS, qui s’est chargé de contacter ses fournisseurs pour qu’ils leur fassent dons de produits.  Les repas ont été préparés dans les cuisines de l’Institut des Métiers par une demi-douzaine de chefs, membres pour la plupart de l’International Club Toques Blanches (*) dont la section Auvergne, présidée par Eric a vu le jour l’année dernière. Autre motif de satisfaction, la participation active de Delphine future boursière des Toques Blanches !nC’est aussi d’avoir pu transmettre sa passion, le partage, la générosité… « La cuisine ce n’est pas difficile c’est exigeant ».

L’heure est à la réouverture des hôtels, cafés et restaurants fermés depuis le 14 Mars 2020 ; l’heure est aussi à la reprise des progressive des formations : ainsi le Greta Val d’Allier accueille de nouveau en présentiel depuis le 19 mai à Brassac, les stagiaires de la formation Titre professionnel Cuisinier sur les modules professionnels.

Un grand merci à Aurélie Gérald, Valentin et Eric pour avoir accepté de se prêter au jeu de l’interview.

 
Pour redécouvrir les étapes de ce défi culinaire, rendez -vous sur :
https://fr-fr.facebook.com/pages/category/Education/Greta-du-Val-dAllier-813232742130568/
post du 25 mai.

**Les Toques Blanches : club de chefs fédérés qui permet d’épauler des jeunes qui, le bac professionnel en poche vont officier dans les grands restaurants et parfaire leurs formations à l’étranger. http://www.lestoquesblanches.fr/